A côté de chez moi se trouve un foyer Sonacotra. Une grande bâtisse blanche, d’un style sobre, qui domine  le cimetière. A droite, un terrain vague. A gauche, un hangar, et, derrière, les petites maisonnettes qui font le charme du quartier.

Ma rue est en sens unique, et l’agent(e) immobilier qui m’a fait visiter la maisonnette que nous habitons prenait le sens interdit, pour éviter de passer devant le foyer Sonacotra et déprécier ainsi la maison. C’est à Toulon que j’ai entendu pour la première fois l’expression « bien habité », glissée d’un air de connivence avant d’entrer dans les lieux que j’étais censé acheter. Je n’étais pas plus flatté que ça d’être inclus dans les « bons habitants ».

Les antennes permettant d’utiliser nos téléphones portables ont évidemment été érigées sur le toit du foyer, puisqu’il est bien connu que les immigrés sont insensibles aux ondes électromagnétiques. Et tout le quartier a pris l’habitude de se débarrasser des gravats, immondices divers, vieil électroménager, sur le trottoir , puisqu’aucun locataire ne se plaindra. Les vieux chauffe-eau, les meubles Ikea déglingués, les épaves de rénovation, de l’huile de vidange prennent place à côté des conteneurs de bouteilles en verre, carton et plastiques, placés également ici pour qu’ils ne dérangent « personne ». Parfois, une certaine poésie surgit de ces déchets. Parfois, une certaine odeur… celle du mépris.

Le bon ordre règne dans notre petit quartier.

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