Les trous du mythe

Entre 1907 et 1930, Edward Curtis photographia ce qu’il restait des autochtones d’Amérique du nord.
En deux siècles, la population des Indiens avait chuté de près d’un million d’individus à environ quarante mille. Ceux qui restaient trainaient leur ennui, leurs maladies et leur alcoolisme dans des réserves déprimantes.
Mais c’est à l’Indien mythique que s’intéressait Curtis, et il fit poser ses modèles dans des costumes qu’ils ne portaient plus, dans des lieux où toute modernité fut maquillée, et dans des situations loin du quotidien de ces pauvres bougres. Un peu comme si l’on prenait aujourd’hui des photos de bretons en costume traditionnel, labourant leur champ d’artichaut en poussant un cheval de trait.
Dans la masse des clichés de Curtis, on peut trouver nombre de portraits, et ce qui m’a poussé à les revisiter, c’est la tristesse profonde du regard des vieux indiens, posant devant ce blanc blanc-bec en ayant encore en soi la violence des combats passés et la tragédie de la défaite humiliante.

 

Pour accompagner ces vieux guerriers, des passages de l’Iliade…

 

 

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« Sac à vin ! œil de chien et cœur de cerf ! jamais tu n’as eu le courage de t’armer pour la guerre avec tes gens, ni de partir pour un aguet avec l’élite achéenne : tout cela te semble la mort ! Certes il est plus avantageux, sans s’éloigner du vaste champ des Achéens, d’arracher les présents qu’il a reçus à quiconque te parle en face. »

 

 

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Il dit, et le chagrin prend le fils de Pélée, et, dans sa poitrine virile, son cœur balance entre deux desseins. Tirera-t-il le glaive aigu pendu le long de sa cuisse? du même coup, il fait lever les autres, et lui, il tue l’Atride. Ou calmera-t-il son dépit et domptera-t-il sa colère ?

 

 

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Athéné, la déesse aux yeux pers, n’a garde de dire non. D’un bond elle descend des cimes de l’Olympe. Promptement elle atteint les fines nefs des Achéens. Elle trouve là Ulysse, que sa pensée égale à Zeus. Il est immobile; il n’a garde de toucher sa nef noire aux bons gaillards : le chagrin envahit son âme et son courage.

 

 

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L’auguste Héré aux grands yeux lui répond:
« Terrible Cronide, quels mots as-tu dits là ? Certes, jusqu’à ce jour, tu n’as de moi subi ni questions ni enquête, et je te laisse en paix méditer de tout ce qu’il te plait. Mais aujourd’hui j’ai terriblement peur dans le fond de mon âme que la fille du Vieux de la mer, Thétis aux pieds d’argent, ne t’ait pu séduire. »

 

 

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Thersite, seul, persiste à piailler sans mesure. Son cœur connait des mots malséants, à foison, et, pour s’en prendre aux rois, à tort et à travers, tout lui est bon, pourvu qu’il pense faire rire les Argiens. C’est l’homme le plus laid qui soit venu sous Ilion. Bancroche et boiteux d’un pied, il a de plus les épaules voutées, ramassées en dedans. Sur son crâne pointu s’étale un poil rare. Il fait horreur à Achille et Ulysse, qu’il querelle sans répit.

 

 

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Il dit, et le fils de Tydée balance entre deux desseins : ne va-t-il pas faire retourner le char, tenir tête à Hector, engager la lutte avec lui? Par trois fois il balance en son âme et son corps : par trois fois le divin Zeus tonne du haut de l’Ida, présageant aux Troyens leur revanche en un combat victorieux.

 

 

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Ah! vous discourez là comme des enfants, de très jeunes enfants, qui n’ont point à songer aux besognes de la guerre. Et que vont devenir, dites-moi, les traités et les serments ? Au feu alors tous les desseins, tous les projets des hommes, et le vin pur des libations, et les mains qui se sont serrées, tout ce que en quoi nous avions foi ! Nous voilà bataillant à coups de mots pour rien, et nous ne savons pas trouver le moindre plan, depuis que nous sommes là.

 

 

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Cependant Athéné, fille de Zeus qui tient l’égide, laisse couler sur le sol de son père la robe souple et brodée qu’elle a faite de ses mains; puis, passant la tunique de Zeus, assembleur des nuées, elle s’arme pour le combat, source de pleurs. Elle monte enfin sur le char de flamme et saisit sa pique, la lourde, longue et forte pique sous laquelle elle abat les rangs des héros contre qui va sa colère de fille de Tout-Puissant.

 

 

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A Ulysse, c’est Mérion qui offre son arc, son carquois, son épée; puis il lui met au front un casque travaillé dans le cuir d’un bœuf. Il est, à l’intérieur, solidement tendu de multiples courroies. A l’extérieur, les dents luisantes d’un sanglier aux crocs blancs sont, sur les deux faces, disposées en grand nombre, avec art et savamment.

 

 

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Elle-même descend dans la chambre odorante, où se trouvent les voiles, les voiles aux mille broderies, œuvre des Sidoniennes qu’Alexandre pareil aux Dieux a ramenés de Sidon, en traversant la vaste mer, au cours du même voyage dont il a ramené aussi Hélène aux nobles ancêtres. Hécube en choisit un, pour le porter en offrande à Athéné. C’est le plus beau en fait de broderies ; c’est le plus grand aussi ; il brille comme un astre. Après quoi, elle se met en route.

 

 

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