L’appel du large

 

 

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… un jour

propre et net, ouvert comme un lit, un quai
à l’heure des adieux – et le mouchoir qu’on tire
est le même qu’hier où les larmes ont séché
– un lit de pierres, et c’est là où nous sommes,

occupés à nous taire longuement,
à contempler par cœur la mer au plafond
comme les poissons rouges du bocal,
avec une fois de plus, une fois encore

tout un dimanche autour du cou.

Guy Goffette

 

 

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…en moi est le goût du sang comme on a le goût du gouffre
mes bras fous ô ma tête existe-t-il un chant qui ne soit pas
chant de la mort des enfants existe-t-il une prière

qui ne soit pas une barque vide est-ce là le goût exact
de la cose terre écoute tout fut massacré jusqu’à l’au-delà
de la mer une immense fosse qu’emplissent des papiers froissés

Mathieu Bénézet

 

 

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Quand je promène les visiteurs, attirés par les mille glaives des églises,
ils ne comprennent pas que cette ville dans le tremblement de l’eau
n’existe pas

Paol Keineg

 

 

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Seule la mer, la mer mobile au souffle de bête arrêtée
arrête mes désirs,
l’eau verte aux muscles lisses
qui dresse les seins et polit le clitoris.

Paol Keineg

 

 

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De
ma
maladie Je
ne
savais
rien.
Simplement l’
effroi
qu’aux
vagues
elle
inspirait.
A toutes!
A toutes!
Journal
froissé
contre
le
hublot
de
la
cabine mauve

Franck Venaille

 

 

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L’océan de hausse millimètre par millimètre, pressant de l’épaule et de la cuisse le diaphragme des écluses,

j’observe la place, le ciel, les terres vagues, les corbeaux et les mouettes qui se querellent pour un morceau de pain,

et j’imagine la brèche, le coup d’eau par la déchirure, le degueulis verdâtre effaçant toute peine et toute illusion.

Paol Keineg

 

 

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L’amer profond, les gestes d’un éveil,
D’un seuil pluvieux aux avant-postes d’une ville,
C’est un grand corps dont les racines se divisent,
Un grand pied bleu et rose dans le vide.

Jean-Paul Guibbert

 

 

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Rien avant la mer. Une table est face au monde. Comme un ultime point d’appui. Un ultime retranchement. Ou encore, un malaise grammatical.

Claude Royet-Journoud

 

 

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Je reste là
tout seul avec le bruit des vagues

Je vois de l’ombre
dans les traces que j’ai laissées

Le ciel me suit
et met de l’ombre sur le sable

Je suis moins seul
que les limites de mon corps

me l’ont fait croire
Les empreintes de mes pieds nus

sont pleines d’ombre
Il me semble que c’est étrange

Jean-Pierre Colombi

 

 

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Dehors ni pluie ni vent. C’est la nuit,
et ce n’est pas encore l’approche du matin.
Un temps mort au début de l’hiver : le temps des provisions de bord,
la part des hommes avec la part des rats,
la part des mots;

Emmanuel Hocquard

 

 

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Des-
cendre
au
plus
profond
du
corps
du
fleuve.

la mer
se
noie!
Plonger!
Plonger!
Puis
retrouver
ce
monde
de si peu
de joie.

Franck Venaille

 

 

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Syllabes de sable, c’est l’été,
rien ne bouge
sinon, séparé du monde,
ce mort en toi qui se lève.

Tu le connais,
toi l’outragé, toi l’humilié
qui vois tout cela.

Viens je te conduirai
dans l’incendie du temps
loin de
la quotidienne imposture.

Jusqu’à ce trait d’écume
blanche comme le soleil,
là-bas : les nuages, l’oubli.

Lionel Ray

 

 

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Dans l’austérité amère de la nuit
Les étoiles s’éteignent à force de regards
C’est entre deux flots que se termine le voyage
Les phares clignent des yeux sur la côte
Je m’illumine soudain comme une algue de phosphore

Paul Louis Rossi

 

 

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Battement de la mer
eau en mouvement eau
errante. débris. thyms.

Orties. contre le temps
j’allais à ton odeur. je m’allongeais sur ta ruine.

Je dormais devant ton corps.

Temps en retour ré
volu maintenant. rose

Photographique soufflée.

Des vents . rose
baie . rosaire

Que ta main arrête
battement temps
qui

de nouveau

arrive

Jacques Roubaud

 

 

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Un brouillard bleu laisse derrière lui
Une haleine froide. L’une des chaises
Est dérangée. la table, près de la porte,
Retenait un revers de rideau. Quand
La mer se retirait, les nuages disparaissaient.
Le paysage était au-delà des arbres.
Nous ne savions plus ce qui avait été
Profondément modifié.
Avec quel bloc il faudrait
Se défendre.

Dans ce climat qui vient des mots.

Henri Deluy

 

 

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Respirez, respirez de la mer peu profonde qui les afflige les buées rances comme le chlore ! On dit que ces eaux recouvrent un empire qui continuerait d’exhaler l’haleine de ses morts. Regrets perdus ! On ne sait, on ne sait la couleur du ciel ni celle du temps. Car tout est détrempé, plus ou moins poitrinaire, arbres creux, pétales blêmes, longs vers livides aussi habiles dans les branches qu’à fuir la tourbe gluante.

Claude Michel Cluny

 

 

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l’image et le mot sont-ils liés ou bien
l’un toujours après l’autre pour que le voir
ou le dire l’emporte chacun son tour
ce que les yeux ont vu là-bas être vu
ne lui suffit pas cela s’érige et rôde
et rue contre le mouvement du poème
mais qu’est-ce qu’un élan minéral et blanc
un silence vertical un temps de pierre

Bernard Noël

 

 

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J’étreignais le sable, j’attendais entre les roches, j’embrassais
L’eau puis le sable, les rochers – ce cœur des choses rêches, – puis un arbre ! M’écriant
Que le langage se dénoue et que telle baigne, en ce lieu,
Qui aurait allumé plus pur encore le mirage.
– Les trois orties de l’ignorance ont poussé devant ma porte !

Quel est ce lieu, quel est cet arbre sur la falaise
Et qui ne cesse de tomber ?

Édouard Glissant

 

 

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Tu reviens de la mer avec des cicatrices
Au genou. Saoul de sel et de soleil tu fonds.
Après cette journée d’absence ta voix crisse,
Ton visage m’échappe et gagne les grands fonds.

Jean Sénac

 

 

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une barque de pêcheur, là-bas, immobile, dur noyau de lumière
sédiment calme de célérité
sa chimie érode
le corps debout
ininterrompu de mer

Lorand Gaspar

 

 

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Nuit sur mer plus noire que mer.
Il faut ramer longtemps, je sais.
La barque est noire et blanche
la peau humide et frileuse
(ton corps sentait la résine vers l’aube et la sauge)
je rame
une jubilation se tend sur les eaux couleur de ramier,
tu casses le pain cuit dans l’écorce d’orange, –
la mer change rapidement d’armure
(je ne te reconnaissais plus le matin dans les draps du regard)
la mer plie de grandes barres de miel roux,

Lorand Gaspar

 

 

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La couleur de la mer est semblable au matin.
Le ciel est plein d’oiseaux que le vent a laissés.
Des navires sont là, des bateaux et des barques.
Et les fruits calmes,
Attendent que l’été leur donne la lumière.

Roger Giroux

 

 

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Râle ou gazouillis
L’eau clapote, lente,
Mourante, naissante.

Menteurs ou frivoles
Nous disons ici
Et sommes sans lieu.

Gaston Puel

 

 

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Comme une goutte d’eau en suspens, avant que la terre se dilue.
Je vois la terre aride.

André du Bouchet

 

 

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De l’eau, de l’eau pour éteindre dans l’homme
Des feux cruels et de faux théorèmes.
Tu déchiras les preuves du matin
Et tu péris sur les champs de bataille
Pour enseigner l’erreur aux petits morts.

Robert Sabatier

 

 

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Le sable est au début comme il sera
L’horrible fin sous la poussée de ce vent froid.
Où est le bout, dis-tu, de tant d’étoiles,
Pourquoi avançons-nous dans ce lieu froid.

Yves Bonnefoy

 

 

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O vide en exil A mer suave
I mage E toile renversée
U topique

Gherasim Luca

 

 

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mais à mon tour dans l’air
je me lèverai un cri et si violent
que tout entier j’éclabousserai le ciel
et par mes branches déchiquetées
et par le jet insolent de mon fût blessé et solennel

je commanderai aux iles d’exister

Aimé Césaire

 

 

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Tout s’amasse,
lumière sur lumière,
ombres séculaires
sur le flanc de ces nudités.
Du silence qui s’abrite
dérivent les cris.

La noyée attachée à l’avant
du bateau
possède la science de la marche
des étoiles.

Michel Fardoulis-Lagrange

 

 

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Hurlant Hurlant face à la mer

au grand dessous des glaciers bleus

S’en allant à grands pas vers la falaise

pour s’y laisser glisser – pour s’y jeter d’effroi

Hurlant – muet – la bouche à vif

à l’instant même de la chute

Ah! sentir les ailes de l’oiseau

Ah! entendre son chant ami

Hurler Hurlant face à la mer

Se taire contre le petit corps chaud

Puis y poser ses lèvres folles

Franck Venaille

 

 

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